La cosmographie de Pierre Apian
La cosmographie médiévale est déterminée par une représentation géocentrique de l'Univers, héritée d'une
longue tradition scientifique qui puise ses racines dans l'Antiquité grecque.
C'est cette vision du monde que Pierre Apian présente à ses lecteurs au second chapitre de son ouvrage (gravure
ci-contre f.6) Elle repose sur la division physique mais aussi philosophique du Monde en deux parties de nature différente :
la région élémentaire et la région céleste.
• La région élémentaire s'étend de la Terre jusque sous la sphère de la Lune. C'est le monde sublunaire,
lieu de tous les changements, de la contingence, de la génération et de la corruption. Quatre éléments simples entrent
dans sa composition :
la terre, l'eau, l'air et le feu. L'élément
terre, de par sa pesanteur, maintient la Terre immobile au centre du Monde.
• La région céleste comprend
dix sphères s'imbriquant les unes dans les autres, depuis la sphère de la Lune jusqu'à celle du Premier
Mobile qui imprime son mouvement diurne de 24 heures à l'ensemble des autres sphères. C'est le lieu de la
perfection, du mouvement circulaire, de l'éther ou
Quinte Essence des Philosophes, le cinquième élément inaltérable et éternel. Au-delà de la dixième sphère,
s'étend l'Empyrée, le séjour de Dieu et des Bienheureux.
Héritage antique transmis en Europe par les savants du monde musulman à l'aube du XIe siècle, cette
représentation des sphères célestes est l’œuvre de la
pensée grecque, formalisée au IVe siècle av J.C. par
Aristote dans ses ouvrages
Du traité du Ciel et des
Météores et consacrée au IIe ap J.C. par Claude Ptolémée dans son ouvrage
La Composition Mathématique, plus connu sous son titre arabisé d'
Almageste. Elle se diffuse et s'impose dans l'occident chrétien qui l'adapte dès le XIIe siècle et
devient la clé de voûte de l'enseignement de l'astronomie lors de la naissance des universités médiévales au
XIIIe siècle.
Le troisième chapitre débute par une définition géométrique de la sphère (
solidum) et de l'axe des pôles (
poli mundi), l'un de ses diamètres. Puis Pierre Apian énumère les cercles imaginaires qui permettent à un
observateur, situé au centre du Monde, de décrire les mouvements apparents des différents corps célestes pour lesquels la
sphère armilliaire est un modèle et une représentation matérielle (gravure ci-contre f.9)
D'abord les six grands cercles de la sphère céleste :
• l'horizon
• le méridien
• l'équateur céleste
• le zodiaque
• le colure des équinoxes
• le colure des solstices.
Puis les quatre petits :
• le tropique du Cancer
• le tropique du Capricorne
• le cercle arctique
• le cercle antarctique.
Au passage, Pierre Apian nous livre la valeur de l'obliquité de l'écliptique qu'il utilise : elle est égale
à 23°30'.
Dans le quatrième chapitre, il démontre la sphéricité de la terre et de l'eau, observable lors des éclipses de
Lune, par la rondeur de l'ombre qu'elles projettent sur le disque lunaire et affirme leur immobilité au centre du
Monde
(in medio mundi immobilis).
Abordant des notions de géographie, il poursuit par la description des cinq cercles de la Terre, identiques à ceux du
Ciel:
• l'équateur
• les tropiques du Cancer et du Capricorne
• les cercles boréal et austral
Ces cercles définissent cinq grandes zones climatiques, les deux zones polaires où il fait un froid horrible, les
deux zones tempérées et habitables et la zone équinoxiale, située entre les tropiques et supposée inhabitable parce que
brûlante et torride.
Dans le cinquième, sixième et septième chapitre, Apian donne les définitions des cercles parallèles terrestres,
des climats (neuf divisions de latitude situés de part et d'autre de l'équateur) et des longitudes, dont le
méridien d'origine était alors situé aux îles Fortunés (les îles Canaries).
Voilà donc le lecteur en possession de bases cosmographiques, astronomiques et géographiques. Les descriptions de la sphère céleste et de la sphère locale sont toujours accompagnées de gravures dont voici un florilège pour conclure ce rapide survol de la cosmographie de Pierre Apian.